Cancel economy · Pourquoi la transition énergétique est une catastrophe économique

Philippe Herlin, économiste

Octobre 2021 • Note 51 •


Le « Paquet climat », présenté le 14 juillet 2021 par la Commission européenne, est une accélération sans précédent dans la lutte contre le réchauffement climatique

Constitué de pas moins de douze textes, il vise à réduire les émissions de CO2 de 55% d’ici à 2030 (par rapport à 1990), avec l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. L’annonce de la fin des véhicules à moteur thermique en 2035 a retenu l’attention. Mais l’automobile n’est pas seule concernée. Tous les transports sont sollicités : aviation, transport maritime et transport routier. C’est en outre toute l’industrie qui sera mobilisée à travers le contrôle de ses émissions de CO2 via le SEQE-UE (Système d’échange de quotas d’émission). Un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM, Carbon Border Adjustment Mechanism) viendra en complément du SEQE-UE afin d’éviter une concurrence déloyale des industriels hors UE. Enfin, la directive sur la taxation de l’énergie fera l’objet d’une importante révision afin de rehausser les niveaux de taxation sur les combustibles fossiles.

Conséquences macroéconomiques de la transition énergétique : vers la décroissance

Après avoir insisté sur ce qu’il faut bien appeler l’hypocrisie du CO2 importé (la baisse des émissions de CO2 provient principalement des importations, c’est-à-dire de la désindustrialisation) et sur l’immense difficulté de l’instauration d’une taxe carbone aux frontières, notre étude tente d’évaluer l’impact de la transition énergétique sur le PIB. Analysant en détails plusieurs travaux fondés sur l’équation de Kaya, elle l’évalue à une décroissance de l’ordre de 2,5 à 3% par an d’ici 2030. Elle rappelle en outre que la Cour des comptes européenne a mesuré le besoin de financement de la transition écologique en Europe à 11 200 milliards d’euros entre 2021 et 2030 : ramené à la France, cela correspond chaque année à 6% du PIB français et à 10,6% des dépenses publiques.

Conséquences sectorielles de la transition énergétique : les ménages et le secteur automobile en première ligne

Notre étude s’efforce également de mesurer l’impact de ces politiques sur différents agents et secteurs économiques. En s’appuyant sur des données du Commissariat général au développement durable et du Boston Consulting Group, elle montre qu’à travers le transport (l’automobile) et le logement, le pouvoir d’achat des ménages sera très lourdement impacté. Elle analyse ensuite les conséquences sur le secteur automobile européen, dont on se demande comment il pourra survivre (le tout véhicule électrique favorisant en dernière instance le « made in China »). Elle passe également en revue les secteurs du logement, de l’électricité et même bancaire.

Conséquences politiques de la transition énergétique : cancel economy et étatisation

Mais il faut aussi prendre la mesure des effets politiques de ces choix, fondés sur un discours systématiquement catastrophiste et une intolérance inquiétante. La transition énergétique comme impératif catégorique aboutit à ce que nous appelons la cancel economy, c’est-à-dire la casse de l’appareil industriel européen et le rejet de ce qui a fait la puissance de l’Occident (progrès scientifique, recherche, applications industrielles, etc.). Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, ne dit rien d’autre quand elle affirme qu’il « s’agit de changer de civilisation, de culture et de mode de vie ». Et c’est par l’action de l’État que ce bouleversement sera rendu possible : en offrant une légitimité morale aux lois, restrictions, interdictions et contraintes imposées aux personnes et aux entreprises, la cancel economy permet aux États de renforcer leur emprise sur la société.

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L’auteur du rapport

Philippe Herlin est économiste, docteur en économie du Conservatoire National des Arts et Métiers (2012), après des études d’économétrie à Paris Nanterre et de finance à Dauphine. Il a publié Finance : le nouveau paradigme (2010), qui a remporté le Prix spécial du jury du Prix Turgot, Repenser l’économie (2012), qui développent la notion de risque extrême popularisée par Nassim Taleb et Benoît Mandelbrot. Il a aussi publié France, la faillite ? (2012), L’Or, un placement d’avenir (2012), La fin des banques ? (2015), Pouvoir d’achat, le grand mensonge (2018) ainsi que plusieurs ouvrages consacrés aux cryptomonnaies, le dernier étant Bitcoin, comprendre et investir (2021). Tous ses livres sont publiés chez Eyrolles. Plus d’information sur www.philippeherlin.com  •

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