Europe, Chine, Tibet · Les enjeux géopolitiques

Jean-Sylvestre Mongrenier, chercheur associé à l’Institut Thomas More

22 avril 2008 • Analyse •


Tant sur le plan politique que moral et spirituel, la cause tibétaine suscite de curieuses réactions dans des segments, il est vrai limités, des opinions publiques (et de ceux qui la font). On n’insistera pas sur la dimension commerciale des relations avec la Chine, de fait importante, si ce n’est pour rappeler que les interdépendances économiques sont réciproques. Les menaces de boycott des produits européens pourraient provoquer en retour des campagnes de « China Bashing ». Prudence donc. Par ailleurs, on ne se désolera pas de voir remise en cause une vision douceâtre et mièvre du bouddhisme. Plus que le « non désir de violence » (Ahimsa), ce sont les concepts de « vacuité » (Sûnyatâ), de « compassion » (Karuna), et d’« extinction » des passions (Nirvâna) qui sont au cœur de cette tradition originelle. Ainsi la pratique requiert-elle une forme de virilité spirituelle, avec des prolongements au quotidien ; il arrive qu’un occupant subisse les rigueurs de cette « voie du Milieu » (Mâdhyamika). L’accusation de « racisme » est plus surprenante. L’histoire millénaire de la Chine est celle d’un mouvement géopolitique d’expansion de l’ethnie Han, du nord vers le sud, puis vers l’ouest et le sud-ouest ; les peuples résistant à ce mouvement tomberaient donc sous le coup de législations anti-discriminations. Grands dieux ! Quant à l’argument « modernisateur », simple reproduction de la logomachie maoïste, il relève du négationnisme. Reste que la question du Tibet et l’attitude de Pékin à l’encontre des « nationalités minoritaires », recèlent d’importants enjeux géopolitiques. L’Europe ne peut s’en désintéresser.