Novembre 2011 • Note •
La « question turque » renvoie au déplacement des équilibres politiques intérieurs, à l’affirmation nationale-étatique au plan extérieur et à la prégnance des référents islamiques. Ainsi l’Occident pourrait-il perdre la Turquie, une puissance clef à l’intersection de grandes aires géopolitiques. Pourtant, la latitude d’action d’Ankara dans un environnement difficile repose sur des réassurances à l’Ouest. A défaut d’une « géopolitique de la ligne claire » susceptible de dissiper les zones d’ombre, l’art de la prudence invite les parties prenantes de cette grande alliance à en privilégier les « fondamentaux ».
Dans les représentations géopolitiques communes comme dans le « monde de la vie », la Turquie constitue une zone de passage entre l’Orient et l’Occident, son territoire se situant à l’intersection de l’Europe, de l’Eurasie et du Moyen-Orient. Le développement économique, l’importance croissante des référents islamiques dans le champ politique et les ambitions des dirigeants turcs sur le plan international ont soulevé ce que l’on nommera la « question turque ». Une interrogation centrale : l’Occident perdrait-il la Turquie ?
Dirigée depuis 2002 par les hommes de l’AKP (Parti de la Justice et du Développement), la Turquie entend se positionner comme un acteur géostratégique de premier plan dans son environnement proche. Malgré les discours relatifs au « modèle turc », le contexte géopolitique est difficile et très incertain. Pourtant, la redéfinition en cours des équilibres politiques ne signifie pas que la Turquie bascule du côté d’un improbable « Orient islamique » unifié. Dans la balance des forces, la Turquie constitue bien une puissance indispensable mais sa latitude d’action est plus réduite qu’il n’y paraît ; la sécurité et la prospérité du pays reposent sur sa « relation spéciale » à l’Occident. Aussi les convergences d’intérêts entre alliés l’emportent-elles encore sur les divergences d’appréciation d’un certain nombre de questions.