21 janvier 2014 • Opinion •
Ce sont donc un « Conseil stratégique de la dépense publique » qui pilotera la nouvelle politique de maîtrise des finances publiques annoncée par le président de la République ; un « Observatoire des contreparties » qui définira, par branches professionnelles, les compensations exigées aux entreprises à la baisse des charges qui leur est promise ; un « Conseil de simplification » qui sera chargé de faciliter la vie des entreprises ; enfin 50 000 « emplois d’avenir » qui constitueront, encore, le fer de lance de la politique de lutte contre le chômage de l’exécutif. S’il y a sans doute eu un tournant dans les mots employés par François Hollande le 14 janvier dernier, et une évolution du diagnostic, les réflexes étatistes ont la vie dure…
Ainsi, c’est avec du vieux que le chef de l’État entend faire du neuf et avec du connu qu’il prétend innover : le comité Théodule est la panacée du techno ! Il est vrai que la France institutionnelle et administrative communie au souvenir de l’âge d’or pompidolien, du Plan, de la politique industrielle et de l’intendance qui suivra. Il est vrai aussi qu’elle oublie avec constance que, dans cette France-là, les dépenses publiques et les prélèvements obligatoires n’excédaient pas 40% du PIB.
De fait, les choses ont bien changé depuis. Voilà 40 ans que la France est en crise, que la part de la dépense publique dans le PIB est en constante croissance, que le budget de l’État est en déficit et que la dette croît. Le chômage n’est jamais repassé sous la barre des 8% depuis 1978. Voilà 40 ans que le pays subit une formidable extension du domaine de l’État et un développement démesuré de son fameux « modèle social ». L’ambition d’une protection sociale toujours accrue des individus a fini par peser sur l’appareil productif, donc sur la croissance et sur l’emploi : à force de vouloir protéger les personnes, on a affaibli l’écosystème dans lequel ils vivent.
Dans le même temps, aucune réforme structurelle n’a été engagée. A rebours de la plupart des pays développés qui, chacun selon ses spécificités et ses aspirations, ont conduit les réformes qui leur ont permis de s’adapter au nouvel âge de la mondialisation, la France caresse son immobilisme et sa prétention de posséder le « meilleur modèle » comme des talismans. Du système des retraites au millefeuille administratif, de l’Éducation nationale au marché de l’emploi, du secteur de la santé à la formation professionnelle : des réformettes, des replâtrages, des mesures d’urgence à foison (25 « réformes de la santé » depuis le plan Barre de 1976 !), mais pas de remises à plat, pas de réformes systémiques, pas de réflexions stratégiques menant à la redéfinition des objectifs ni des moyens.
La France de 2014 en est là et les outils retenus pour mettre en œuvre le pacte de responsabilité procèdent toujours de cette vision dirigiste usée jusqu’à la corde. Car de fort qu’il était, l’État est devenu obèse et son intervention a perdu en efficacité ce qu’elle a gagné en surface. Sur la réduction des dépenses publiques, sur la baisse des charges des entreprises, sur la simplification administrative, le recours aux commissions et autres comités de pilotage masque mal l’incapacité à agir fort et vite et donne une couleur d’impuissance au volontarisme affiché par l’exécutif.
Soit illusion (sur la capacité de l’État à agir), soit illusionnisme (pour faire croire que la barre est bien tenue), les annonces du président de la République ont laissé sceptiques 70% des Français. C’est qu’eux constatent, dans leur vie courante, à l’école, à l’hôpital ou à Pôle Emploi, la grande fatigue d’un modèle et d’un mode d’action qui peinent tant à obtenir des résultats probants parce qu’ils ont fait leur temps.