Juin 2014 • Tribune 42 •
Le conflit géopolitique autour de l’Ukraine, les risques et menaces sur les exportations de gaz russe à destination de l’Europe et la récente signature d’un contrat gazier sino-russe (Shanghaï, le 20 mai 2014) appellent l’attention sur les relations énergétiques entre l’UE et la Russie. Si les autorités européennes ont cherché à dépolitiser la question, les dirigeants russes font toujours prévaloir une approche stratégique et géopolitique. Dans ce jeu d’interdépendances, l’UE et ses États membres disposent de réelles marges de manœuvre, pour autant qu’ils conduisent une politique cohérente et volontaire.
A la fin de la Guerre froide, l’importation de pétrole et de gaz depuis la Russie était présentée comme un recours pour diminuer la dépendance de l’Europe vis-à-vis du Moyen-Orient. La « transition » de la Russie post-soviétique vers la démocratie de marché et les complémentarités naturelles entre l’Est et l’Ouest du continent devaient dépolitiser le secteur énergétique, les aspects techniques, juridiques et commerciaux l’emportant sur la grande stratégie et les logiques de puissance. Depuis, les « guerres du gaz » russo-ukrainiennes (janvier 2006 et 2009) et autres embargos énergétiques à l’encontre de pays d’Europe médiane et du Sud-Caucase ont terni l’image de la Russie comme exportateur fiable. La crise géopolitique autour de l’Ukraine a amplifié le processus.
Dans ce conflit rampant, la question énergétique est centrale. Du côté occidental, les sanctions pourraient toucher le secteur de l’énergie. Quant à la Russie, ses dirigeants menacent d’interrompre les exportations vers l’Europe, voire de les réorienter vers l’Asie. Au vrai, le statu quo est déjà remis en cause et la structure des échanges est appelée à se transformer encore. Dans cette relation énergétique, l’UE et ses États membres disposent de réelles marges de manœuvre, d’autant plus que les renouvellements du marché mondial du gaz ouvrent d’autres perspectives. Pourtant, le seul jeu du marché ne suffira pas et il faudra renforcer la « politique européenne de l’énergie ». Enfin, il doit être clair que la question énergétique relève de problématiques géopolitiques plus larges qui appellent une nouvelle attitude vis-à-vis de la Russie.