1er décembre 2014 • Opinion •
Alors que le projet de loi de finances 2015 illustre l’impasse dans laquelle se trouve la France depuis près de dix ans, il est temps d’avoir le courage d’ouvrir certains débats interdits ! Par exemple, celui de la réforme de l’éducation nationale…
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2015 illustre l’impasse dans laquelle se trouve la France depuis près de dix ans. Comme depuis 2008, l’objectif de ramener le déficit public à 3% du PIB ne sera pas atteint et ce, malgré les mesures correctives annoncées par l’exécutif sous la pression de Bruxelles. A 2 000 milliards d’euros, la dette atteint désormais 95% du PIB. Ces déséquilibres financiers persistants créent le cercle vicieux de la croissance atone, du chômage endémique et de la hausse sans fin des prélèvements.
Face à ce mur, la France n’a d’autre choix que de s’engager résolument sur le chemin de la réforme structurelle de l’État qui, seule, permettra la baisse de la dépense publique, le retour de la croissance, la création d’emplois et la libération d’une société française asphyxiée et à cran. La réforme de l’État est certes un serpent de mer. On croira facilement que tout a été dit. Il est pourtant des débats qu’il faut avoir le courage d’ouvrir. Un exemple : la réforme de l’éducation nationale.
Comment imaginer en effet une réforme de l’État en profondeur dès lors que le ministère de l’éducation nationale, qui représente tout de même son premier budget et 51% de l’emploi public recrutés par l’État, se trouve sanctuarisé depuis 2012 ?! Depuis bientôt trois ans, l’augmentation régulière du budget de ce ministère tient lieu de politique… Malgré une enveloppe de 65 milliards d’euros, le gouvernement parvient-il à répondre au malaise d’enseignants mal payés et trop souvent déconsidérés ? À améliorer les résultats des élèves ? À réduire le nombre de décrocheurs scolaires (environ 140 000 par an, soit 10% des élèves) ? Malgré les efforts considérables consentis par la Nation, les résultats scolaires des élèves ne progressent plus, voire régressent dans certaines disciplines. En sanctuarisant l’éducation nationale, en refusant de s’interroger sur ses moyens et ses résultats, le gouvernement a fait le choix de concentrer la réduction des dépenses sur d’autres ministères qui finissent par mal fonctionner et se paupériser.
Il est donc temps d’appeler à une réforme structurelle de l’éducation nationale, par la régionalisation, qui se fixera le double objectif d’un fonctionnement plus souple et plus efficace et d’une réduction des coûts. Pour être cohérente, cette réforme doit reposer sur trois axes.
D’abord, confier aux régions le recrutement et la gestion des enseignants du second degré public (380 600) tout en leur donnant compétence, non plus seulement sur les lycées, mais également sur les collèges. Pour mieux adapter les besoins éducatifs et répondre aux différences territoriales, l’État a tout intérêt à clarifier les responsabilités en faisant de la région son unique interlocuteur.
Ensuite, proposer aux enseignants volontaires de passer du statut de fonctionnaire à celui de contractuel, et ce, contre une rémunération plus attractive. Le manque de considération ressenti par nombre d’enseignants ne tient pas uniquement à l’aspect financier, mais il y participe nécessairement. Or, il n’est pas possible pour l’État de rémunérer mieux plus de 700 000 professeurs du public tout en préservant le principe de l’emploi à vie. Une gestion salariale régionalisée et l’introduction d’une contractualisation à durée indéterminée sur la base du volontariat sont de vraies alternatives pour améliorer sensiblement le traitement des enseignants. Par ailleurs, la décentralisation de l’école permettrait une gestion des carrières plus adaptée aux souhaits, notamment géographiques, des professeurs.
Enfin, permettre aux établissements, et d’abord ceux en zone d’éducation prioritaire, de recruter les enseignants en fonction des difficultés du terrain, du projet pédagogique et du choix de ces derniers qui adhéreraient dès lors pleinement au projet de l’établissement, créant ainsi une véritable dynamique d’équipe. Il est temps de donner plus de liberté et de capacité d’agir aux acteurs de terrain et, en premier lieu, aux chefs d’établissement.
Pour autant, la régionalisation de l’éducation ne remettra pas en cause sa dimension nationale. À l’État de continuer à fixer les grands objectifs assignés à son école et d’arrêter le contenu des programmes et des diplômes. À lui aussi de fixer les règles nécessaires aux mutations des enseignants d’une région à une autre.
Une telle réforme ne pourra aboutir sans la conclusion entre l’État, les collectivités territoriales et la communauté éducative, d’un nouveau pacte républicain pour l’école qui, en échappant enfin aux vieux débats usés, redonnera au pays, et d’abord à ses enfants, l’école qu’ils méritent.