Décembre 2014 • Note de Benchmarking 17 •
Entre revirements multiples du gouvernement et mécontentements divers des élus, la réforme territoriale, voulue par François Hollande, n’en finit pas d’alimenter l’actualité. Après la suppression du conseiller territorial voté par la précédente majorité, après l’adoption en janvier dernier de la loi d’affirmation des métropoles (loi MAPTAM) et de celle, en décembre, relative à la délimitation des régions, le projet de loi pour une Nouvelle Organisation Territoriale de la République (NOTRe) s’apprête à être examiné en première lecture par le Sénat le mardi 16 décembre…
On peut douter que ce nouveau texte soit le grand texte décentralisateur et clarificateur attendu depuis quarante ans dans notre pays. Le gouvernement, qui souhaite proposer rien moins qu’une « nouvelle organisation territoriale de la République en substituant à la clause de compétence générale des compétences précises confiées par la loi à un niveau de collectivité », l’affirme pourtant. Deux raisons, au moins, permettent d’en douter. Tout d’abord, la récente expérience du texte sur la délimitation des régions qui a montré le défaut de méthode et de pédagogie de l’exécutif sur un dossier pourtant majeur. Ensuite, les nombreux revirements et flottements du gouvernement depuis le lancement de la réforme laissent davantage augurer d’une volonté d’aboutir à un texte a minima qu’à un véritable big bang territorial.
La France aurait pourtant besoin d’une réforme profonde de son architecture territoriale et de l’action publique. Mais une telle réforme réclamerait du courage, tant les habitudes, les conservatismes et les frilosités sont nombreuses. Meilleure efficacité de l’action publique locale, meilleure répartition des compétences, simplification administrative, baisse de la dépense, plus grande proximité avec les citoyens, dynamisation et ouverture des territoires : tels seraient les enjeux réels d’une réforme des collectivités si l’on voulait qu’elle soit porteuse de vrais changements. Dans un contexte financier de plus en plus difficile pour l’État comme pour les collectivités – qui doivent participer au redressement des comptes publics –, la redéfinition des périmètres d’intervention de chaque échelon territorial est sans doute une priorité. Mais cela ne suffira pas : c’est à une refondation de l’ensemble de l’action publique que le pays est appelé, État compris.
L’objectif de la nouvelle note de Benchmarking de l’Institut Thomas More est d’alimenter le débat grâce à la démarche comparative. Elle offre, à l’aide d’informations claires et précises, de chiffres et de données clefs, un éclairage sur la situation dans neuf pays européens, et permet ainsi d’identifier les lignes de force de la meilleure réforme possible et les bonnes pratiques qui pourraient l’inspirer.
Elle s’emploie d’abord à dénoncer trois idées reçues qui encombrent le débat sur la réforme territoriale dans notre pays. Ainsi à l’épreuve des faits et des exemples observés peut-on affirmer que la question de la suppression d’un échelon ne garantit pas une réforme territoriale réussie et qu’il est donc assez vain de se focaliser sur l’objectif de la suppression du département ; que la fusion des régions et l’« évaporation » des départements n’entraîneront pas d’économies substantielles par eux-mêmes et que c’est la question des politiques publiques (et en surplomb, de la pérennité du modèle social) qu’il faut poser ; qu’enfin il n’existe pas de « taille critique » pour les collectivités et que c’est la cohérence du « projet territorial » qui fait le succès d’un territoire.
Elle montre ensuite ce qu’on peut appeler le « carré magique » d’une réforme territoriale réussie. De l’observation des réformes les plus intéressantes conduites chez nos voisins européens, il ressort en effet quatre constantes : la clarification des compétences des collectivités locales ainsi que de celles de l’État ; le renforcement du rôle stratégique de la région ; l’enclenchement de la réduction des dépenses publiques par la refondation des finances locales et l’optimisation du bloc communal en fonction des spécificités territoriales.
Elle s’attache enfin à développer quatre cas concrets d’exercice de compétences par les collectivités territoriales. A travers l’exemple du développement économique, on verra qu’il est indispensable de simplifier drastiquement les dispositifs existants et de renforcer le rôle des régions. A travers l’exemple des services environnementaux, on montrera comment une meilleure gouvernance et le renforcement de certains outils de coopération permettent de réaliser certains investissements à long terme dont la collectivité a besoin. A travers l’exemple de l’éducation, on montrera quelles évolutions sensibles il est possible de faire accomplir à la fonction publique. A travers l’exemple de la culture enfin, on verra comment achever réellement le processus de décentralisation et en profiter pour réduire concrètement les financements croisés.