Mars 2021 • Rapport 21 •
Le rapport en 4 questions
La crise sanitaire a mis au jour le grand dénuement technologique européen et les dirigeants de l’Union européenne rivalisent de déclarations sur la « souveraineté numérique européenne ». Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, plaide pour une « souveraineté technologique » européenne et appelle les Européens à être des « optimistes technologiques ». Le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton affirme pour sa part que le temps est venu « d’assurer la souveraineté numérique de l’UE ».
La chancelière Angela Markel mobilise elle aussi ses collègues chefs d’États et de gouvernements en faveur de la « souveraineté numérique » de l’UE et son autonomie technologique face aux autres puissances du globe. Quant au président français Emmanuel Macron, il dit croire « dans un marché numérique européen » et affirme tout de go que « la vraie souveraineté se bâtit au niveau européen ».
L’objectif du rapport de Cyrille Dalmont est de prendre ces déclarations au sérieux et d’évaluer les capacités réelles de l’Union à mettre en œuvre une « souveraineté numérique » • Une souveraineté numérique européenne est-elle possible ? Sur quels fondements politiques et juridiques la bâtir ? Et l’UE et ses membres ont-ils les moyens de cette ambition ? C’est l’objet de ce rapport que de répondre à ces questions.
D’abord, en s’interrogeant sur le concept même de « souveraineté numérique » • Après avoir montré qu’il constitue une notion problématique, sujette à interprétations et dont l’assise juridique et normative est encore incertaine, il s’efforce de proposer tout de même une définition, sur la base des travaux de recherche les plus récents. Puis il confronte l’UE et ses capacités politiques, juridiques et économiques à cette définition. Il montre ainsi à quel point elle est démunie.
La deuxième partie analyse le concept de « souveraineté européenne » et explique pourquoi il constitue un mirage politique • L’Union a été conçue et demeure pour l’essentiel un marché dominé par un droit de la concurrence rigide et une « politique de la règle » (Luuk van Middelaar) qui désarme trop souvent les États dans la bataille numérique mondiale. Si les déclarations citées plus haut témoignent d’une timide prise de conscience, le changement de paradigme n’est toujours pas à l’ordre du jour.
La troisième partie formule neuf propositions d’actions, réalisables à droit constant, sans ouvrir la boîte de Pandore de la renégociation des traités • Ces propositions réclament volonté et ambition mais l’UE est au pied du mur. Plutôt que de se satisfaire de slogans, les dirigeants européens doivent s’atteler à la tâche…
Nos propositions
Proposition 1 • Définir une « clause d’exception » ou de « non-application » du droit européen de la concurrence dans les domaines stratégiques liés au numérique
Proposition 2 • Stimuler la réindustrialisation européenne en révisant le statut des groupements européens d’intérêt économique (GEIE) et en favorisant la création de zones économiques spéciales européennes (ZESE) et de groupements d’intérêt public européen (GIPE)
Proposition 3 • Sécuriser le marché des puces électroniques et des semi-conducteurs
Proposition 4 • Mettre en œuvre une stratégie d’innovation industrielle dans le secteur des objets connectés
Proposition 5 • Réinvestir le marché des smartphones
Proposition 6 • Favoriser l’émergence de data centers et de clouds souverains de niveau mondial dans les États membres
Proposition 7 • Favoriser une stratégie européenne dans le domaine des véhicules lourds autonomes
Proposition 8 • Promouvoir et soutenir un véritable plan Marshall de la formation professionnelle numérique dans tous les pays membres
Proposition 9 • Accompagner et financer la création de plateformes d’enseignement numérique universelles dans les pays membres
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L’auteur du rapport
Cyrille Dalmont est chercheur associé à l’Institut Thomas More. Titulaire d’un Master de droit public, ancien conseiller parlementaire à l’Assemblée nationale et ancien chargé de mission dans une grande métropole française, il a aujourd’hui rejoint le secteur privé. Au sein de l’Institut Thomas More, il analyse les mutations sociales et politiques provoquées par la numérisation massive de nos sociétés. Ses recherches portent actuellement sur deux axes principaux : les questions de régulation et les enjeux éthiques liés au déploiement du numérique et son impact sur les droits fondamentaux et les libertés publiques, et les enjeux de souveraineté numérique, tant au niveau national que de l’Union européenne • |