L’enfant « en situation de handicap » et l’école

Christian Flavigny, pédopsychiatre, psychanalyste et chercheur associé à l’Institut Thomas More

20 janvier 2022 • Opinion •


Une nouvelle polémique est née des propos d’Éric Zemmour relatifs à l’accueil des « enfants en situation de handicap » en milieu scolaire. Un problème qu’il vaut mieux clarifier que passionner.


L’accueil d’un enfant handicapé commence ainsi : la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) reçoit les recommandations des médecins (médecin traitant, pédiatre, pédopsychiatre) relatives aux besoins spécifiques des enfants « en situation de handicapé » ; elle entérine le plus souvent leurs préconisations, et alors notifie : soit l’insertion en milieu scolaire ordinaire avec une Assistante de vie scolaire (AVS) ou dans une classe spécifique comme une unité spécialisée pour l’inclusion scolaire (ULIS) ; soit enfin l’orientation vers un établissement spécialisé, le plus souvent un institut médico-éducatif (IME) ou un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP) offrant une approche plurielle de l’éducation avec un concours médical et psy.

Ainsi l’éducation offerte à tout enfant de six à seize ans est officialisée dans son principe et adaptée à sa situation. L’accueil en milieu scolaire ordinaire de l’enfant en situation de handicap est une solution toujours préférée, toujours préconisée si elle correspond à l’intérêt de son développement et de ses acquisitions. Mais ce peut ne pas être le cas, aussi dévoués et attentifs soient les enseignants, irréprochables dans leur attention à l’épanouissement personnalisé de chaque enfant, aussi enrichissante soit pour les autres enfants de la classe l’ouverture à la diversité auprès de leur camarade. Si l’enfant risque d’être plutôt pénalisé par son « inclusion » en milieu scolaire ordinaire, son orientation est justifiée vers un établissement spécialisé, ce qui ne correspond pas à une exclusion mais à une adaptation de l’éducation à ses besoins.

Le problème est dans le décalage entre le principe d’égal accès à l’éducation, et la réponse, dans les faits défaillante pour les enfants les plus fragiles ; le principe devient un simple slogan. Une fois obtenue la notification par la MDPH, il revient aux professionnels et aux parents de trouver l’établissement adapté ; et là il est fondé de parler de « galère » : c’est souvent en années qu’il faut compter le temps avant qu’une réponse positive aux nombreux dossiers adressés permette l’admission attendue. La situation est comparable pour l’accès aux soins dont ont besoin les enfants en souffrance psychologique : dans bien des centres médico-psychologiques (CMP), l’attente d’un premier rendez-vous se compte désormais en années.

D’où résulte le problème : l’« inclusion » d’un enfant en milieu scolaire ordinaire qui résulterait d’une pénurie de réponse adaptée et non de la solution appropriée à ses besoins effectifs, serait tout aussi choquante que seraient des décisions de justice qui résulteraient de s’adapter à un manque de places en prison.

Or telle est pourtant la situation ; ce pourquoi l’accueil des enfants en situation particulière de handicap ou de souffrance psychologique, mérite toute sa place au cœur des débats actuels.