![](https://institut-thomas-more.org/wp-content/uploads/2025/02/20250203-Dalmont-VA-Picture1-350x233.jpg)
3 février 2025 • Opinion •
Les réseaux sociaux sont des révélateurs du fossé qui se creuse entre la population et les élites dites « progressistes », qui se voient perdre leur mainmise sur le récit unique et contrôlé du réel conforme à leur corpus idéologique. Pour Cyrille Dalmont, elles n’ont plus qu’une solution : restreindre la liberté d’expression.
« Si l’Europe n’est pas capable de réguler X, j’en sortirai et la Cour des comptes en sortira » : cette déclaration de Pierre Moscovici, postée sur X ce 26 janvier, est la parfaite illustration de la tendance en pleine expansion de personnalités de gauche qui considèrent qu’elles possèdent non seulement le monopole de la description du réel mais, pire, des institutions qu’elles sont censées servir. Derrière cette déclaration, qui emboîte le pas à de nombreuses autres prises de positions de personnalités de gauche et d’extrême gauche, Pierre Moscovici ancien ministre socialiste, ancien commissaire européen et désormais Président de la Cour des comptes, s’inscrit dans une dynamique où le contrôle des espaces numériques devient une obsession de tous les instants.
« Une internationale réactionnaire »
En effet, ces plateformes, qui permettent à des vérités parfois brutales, et brutalement formulées, de circuler librement, dérangent profondément une classe dirigeante qui s’est habituée à modeler la réalité selon ses propres intérêts. Ce n’est pas un hasard si, trois semaines plus tôt, Emmanuel Macron, lors de son allocution devant les ambassadeurs français, dénonçait sans le nommer Elon Musk comme le soutien à une « internationale réactionnaire » et accusait X d’ingérence dans les élections européennes.
Cette attaque, tout comme celle de Pierre Moscovici, traduit un malaise profond : celui de ne plus parvenir à imposer un récit unique et contrôlé du réel conforme au corpus idéologique défendu par les élites dites « progressistes ». Ce malaise est d’ailleurs partagé par les élites progressistes de l’Europe entière qui ont fait de X leur cible privilégiée ces derniers mois.
Depuis le début de son premier mandat, le président Macron s’est évertué de manière constante à lutter contre ce qu’il considère comme des « dérives » des réseaux sociaux et de la désinformation. Cette volonté de contrôle s’est traduite par des initiatives législatives successives, comme la loi contre la manipulation de l’information en 2018, la loi Avia en 2020 (censurée par le Conseil constitutionnel pour son caractère liberticide) ou encore le rapport Bronner de 2022. L’ensemble de ces textes poursuivaient tous le même objectif : contrôler le récit du réel auprès des populations jugées insuffisamment éclairées pour recevoir une information non décryptée au préalable par des acteurs autorisées (c’est la logique des « fact-checkers »). La loi visant à « sécuriser et réguler l’espace numérique » (mai 2024), s’est également inscrite dans cette continuité en réintroduisant sous une autre forme les idées censurées par le Conseil constitutionnel dans la loi Avia.
A travers cet arsenal, les réseaux sociaux ne sont pas attaqués pour ce qu’ils sont mais pour ce qu’ils révèlent. Ces plateformes sont devenues les miroirs des échecs de l’État et du fossé croissant entre les élites et la population. Ils exposent ce que les médias traditionnels, souvent alignés sur les positions progressistes, préfèrent taire : violence urbaine, narcotrafic, sentiment de submersion migratoire, islamisme conquérant, etc.
Adèle Van Reeth, directrice de France Inter, a assumé en mars 2024 diriger « une radio progressiste »
En France, un sondage de 2012 révélait que 74 % des journalistes votaient à gauche ou à l’extrême gauche. Une homogénéité idéologique qui, loin d’être corrigée, se traduit aujourd’hui par des déclarations explicites. Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, affirmait ainsi en 2023 que l’audiovisuel public cherche à « représenter la France telle qu’on voudrait qu’elle soit ». Quant à Adèle Van Reeth, directrice de France Inter, elle a assumé en mars 2024 diriger « une radio progressiste ». Ces mots décomplexés indiquent une intention claire de modeler le réel, souvent en décalage avec les préoccupations des citoyens.
En juin 2024, les émeutes qui ont embrasé plusieurs villes françaises ont illustré cette fracture. Les réseaux sociaux, accusés d’amplifier la violence, ont d’abord permis de révéler une réalité : l’incapacité de l’État à maintenir l’ordre face à des émeutiers, parfois âgés de seulement douze ans. Plutôt que d’assumer cet échec, le gouvernement a préféré cibler les plateformes, allant jusqu’à envisager de couper temporairement l’accès aux réseaux sociaux. C’est dire à quel point la corrélation entre l’effondrement de l’autorité publique et la volonté obsessionnelle du Président de réguler l’information sont liées.
Quant à la polémique concernant X, elle s’est surtout amplifiée lorsqu’Elon Musk a dénoncé l’inaction, selon lui coupable, du Premier ministre socialiste britannique Keir Stamer face aux viols de dizaines de milliers de mineurs outre-manche dans l’affaire des « grooming gangs » composés d’indo-pakistanais lorsqu’il était Haut responsable du ministère public. Aussi odieux que soient ces crimes, ils ne devaient pas remettre en cause le récit du vivre ensemble dans les sociétés multiculturelles.
Lorsqu’à la suite de nombreuses autres personnalités de gauche, Pierre Moscovici menace de quitter X, ce n’est pas par rejet de contenus abjectes ou d’incitations à la haine – la brutalité, l’agressivité ou la crudité de certains d’entre eux, bien réelles, renvoient à l’ensauvagement de la société dans son ensemble, que le réseau révèle ou excite mais qu’il ne crée pas. C’est parce que ce réseau, depuis son rachat par Elon Musk, ne se conforme plus aux standards idéologiques des élites progressistes. Musk, en rétablissant des comptes suspendus (de droite essentiellement) et en libéralisant les règles de modération, a brisé le monopole narratif que cette classe exerçait jusque-là sur les réseaux sociaux.
Un récit alternatif mobilisateur
Pour ces personnalités, X est devenu un espace où leurs contradictions sont mises à nu et où les citoyens, peuvent confronter les discours officiels à leur propre réalité et reprendre la parole. Cette perte du monopole narratif est insupportable pour une élite habituée à imposer sa vision du monde, souvent en décalage avec les faits. La récente victoire de Donald Trump, malgré l’hostilité déclarée des médias progressistes américains, a montré qu’un récit alternatif pouvait encore mobiliser massivement les populations occidentales. Ce succès est une gifle symbolique pour ceux qui croient pouvoir contrôler indéfiniment l’information et maintenir les masses dans un « socialisme mental » intemporel.
En Europe, le fossé entre les élites et les populations s’élargit également à mesure que la censure et la manipulation du réel se multiplient. Face à cette montée de la défiance, plutôt que de reconnaître leurs échecs, les élites persistent dans leur obsession de contrôler l’information, quitte à accentuer les tensions et à provoquer des fractures irréversibles au sein des populations européennes. Si elles continuent à restreindre la liberté d’expression et à dissimuler la vérité sous des couches de moraline progressiste, elles risquent de précipiter une société déjà fragmentée dans des affrontements qui ne seront plus seulement par réseaux sociaux interposés.