
Juillet 2025 • Note 76 •
Lien entre insécurité et immigration : un débat sensible et rendu difficile par le manque de données fiables et des biais idéologiques puissants
Alors que sondage après sondage, les Français martèlent que l’insécurité et l’immigration comptent parmi leurs principales préoccupations, la question de l’existence d’un lien entre les deux est l’un des sujets les plus sensible du débat public en France. Le manque de données statistiques fiables et les biais idéologiques souvent observés dans la recherche rendent difficile une évaluation objective. L’absence de statistiques ethniques limite la compréhension des dynamiques migratoires, tandis que les données sur la délinquance, davantage disponibles, restent insuffisantes. Certains chercheurs nient tout lien entre insécurité et immigration, souvent en s’appuyant sur des arguments biaisés, comme la précarité économique des étrangers, un traitement différencié par la justice ou certains médias qui en feraient trop sur ces sujets.
Un faisceau de données de plus en plus probantes
Malgré ces lacunes, des données éparses mais tirées des statistiques des services de l’État montrent une surreprésentation des étrangers difficilement contestables dans certaines formes de délinquance. Un premier chiffre est connu : 24,5 % des détenus des prisons françaises sont étrangers, soit une représentation 3 fois supérieure à leur poids démographique. En voici quelques autres : en 2021, 18 % des personnes mises en cause par la police et la gendarmerie étaient étrangères (représentation 2,3 fois supérieure). Les statistiques révèlent également une forte implication des étrangers dans les cambriolages (38 %) et les vols violents sans arme (31 %) sur l’ensemble du territoire. Ces chiffres, bien qu’incomplets, constituent un faisceau d’indices probants.
Les crimes et les délits impliquant des clandestins sous OQTF
Dans ce brouillard, il est une réalité encore moins documentée : celle des crimes et des délits impliquant des personnes de nationalité étrangère faisant l’objet d’une OQTF. Il n’existe pas de statistiques mais il existe des faits bien réels qui défraient de plus en plus souvent la chronique, émeuvent et révoltent les Français. Peut-on les réduire à de tragiques mais de simples faits divers ? Cela nous paraît contestable compte tenu de leur récurrence dans la durée et dans l’espace et de l’émotion collective qu’ils suscitent. Il n’est pas interdit d’y voir désormais un fait de société. Un fait de société qui s’ancre dans la majuscule impuissance des pouvoirs publics à améliorer sensiblement l’exécution des OQTF.
OQTF : l’impuissance érigée en système
Cette question est connue : entre 2019 et 2024, 766 448 OQTF ont été prononcées mais leur taux d’exécution ne dépasse pas 6 à 7 %. Difficulté d’obtenir des laissez-passer consulaires, engorgement des préfectures et des juridictions, manque de moyens humains et matériels, recours suspensifs, manque de places en centres de rétention administrative (CRA), durée maximale de rétention limitée à 90 jours : de nombreux obstacles expliquent cette inefficacité.
Concentrer l’effort sur les personnes sous OQTF les plus dangereuses pour la sécurité des Français
La proposition que nous formulons ici vise à différencier les OQTF par types pour simplifier le contentieux, comme le suggèrent le Conseil d’État et la Cour des comptes, afin de concentrer l’effort des services de l’État sur l’exécution des OQTF prononcées pour menace à l’ordre public et à la suite d’une condamnation pénale, qui représentent 7 % des OQTF totales. Nous recommandons ainsi de durcir les dispositions pour ces catégories, notamment en précisant les critères de menace à l’ordre public, en appliquant une OQTF sèche ou avec un délai de départ volontaire réduit pour les individus menaçants pour l’ordre public et en plaçant systématiquement les individus concernés en rétention administrative. Cela nécessiterait une augmentation des capacités des CRA, un allongement de la durée maximale de rétention à 18 mois et une suppression de l’assignation à résidence comme alternative à la rétention. Enfin, nous proposons d’assortir ces OQTF d’une interdiction de territoire français (ITF) de 5 à 10 ans. Ces mesures visent à améliorer l’exécution des OQTF pour les individus les plus dangereux pour la sécurité des Français, à renforcer effectivement la sécurité des citoyens et à envoyer un message de fermeté aux immigrés illégaux et aux réseaux de passeurs.
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Les auteurs
Jean-Thomas Lesueur est directeur général de l’Institut Thomas More. Titulaire d’un Master d’histoire moderne (Paris IV Sorbonne), Il a débuté sa carrière comme rapporteur de groupe de travail à l’Institut Montaigne avant de participer à la création de l’Institut Thomas More en 2004. D’abord directeur des Études, il est devenu directeur général en 2007. Au sein de l’équipe de l’Institut Thomas More, il supervise le suivi de la vie politique française. Il s’intéresse en particulier aux blocages politiques et institutionnels propres au « modèle français », à la décentralisation et à la démocratie locale. Il réfléchit également aux questions migratoires et aux problématiques politiques liées aux enjeux culturels et identitaires en France et en Europe. Il a notamment publié le rapport Immigration : propositions pour une politique intégrale en 2022 et contribué au livre dirigé par Pierre Manent, Christianisme et migrations en 2024 • |
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