14 juin 2013 • Opinion •
Parmi les conclusions du Conseil européen du 22 mai 2013, trois sont particulièrement significatives pour la politique énergétique européenne : la politique européenne de l’énergie doit assurer la sécurité de l’approvisionnement des ménages et des entreprises à des prix et des coûts abordables et concurrentiels ; il reste crucial de continuer à accroître la diversification d’approvisionnement énergétique en Europe et de développer les ressources énergétiques domestiques, de réduire la dépendance énergétique à l’égard des pays extérieurs à l’Union européenne et de stimuler la croissance économique ; l’impact des prix et coûts élevés de l’énergie doit être évalué.
Pour la première fois, les coûts croissants de l’énergie et le déclin de compétitivité de l’économie européenne retiennent plus l’attention des dirigeants européens que les ambitions de l’UE en matière de politique climatique. Ce changement d’orientation fait suite au rejet, par le Parlement européen, de la proposition de réforme du système ETS (Emission Trading System), ardemment défendue par la Commissaire au climat, Connie Hedegaard.
Le sommet européen du 22 mai exhorte donc les pays membres à exploiter leurs propres ressources énergétiques et à assurer la sécurité et la diversification d’approvisionnement énergétique, tout en veillant à rester compétitif.
Or la Belgique et, en particulier la Wallonie, dispose, outre la biomasse, d’une ressource énergétique domestique, renouvelable, non polluante dans la plupart des cas, permanente et stable : l’énergie géothermique c.à.d. l’énergie stockée dans le sol sous forme d’eaux chaudes ou de roches chaudes à plus ou moins grande profondeur.
Deux sites sont déjà en exploitation, ceux de Saint Ghislain et de Douvrain, en région montoise. Il s’agit, dans les deux cas, de production d’eau chaude provenant d’un aquifère qui s’étendrait sur 5 km de large et 20 km de long. « Sous l’axe est-ouest du bassin de Mons, l’aquifère géothermique profond semble épais, de grande capacité et exploitable durablement. Plus au nord, il est réduit, moins capacitif ».
Des forages sont prévus pour trois nouveaux projets-pilotes. Le premier est situé sur le chantier de la future gare de Mons. La puissance thermique de ce gisement d’eau chaude à 2 500 m de profondeur, est estimée à 6 MW, soit 120 m^3/h à 55°C. Un deuxième projet, de moyenne énergie, est envisagé sur un site situé entre Charleroi et Tournai pour produire de la chaleur et de l’électricité. Enfin, le troisième projet dépendra du développement des deux premiers.
Le coût du forage reste élevé mais il est appelé à diminuer vu que les industriels qui travaillent pour l’exploitation pétrolière commencent à s’intéresser à cette forme d’énergie.
Des expérimentations sont en cours pour augmenter les performances d’exploitation de l’énergie géothermique et, partant, en réduire les coûts. Elles portent notamment sur la technologie connue sous l’acronyme EGS (Enhanced Geothermal System) qui consiste à augmenter la perméabilité de la roche par des techniques de stimulation adéquate. Le projet-pilote européen de Soultz (France), utilisant cette technique, livre déjà des informations précieuses.
D’autre part, le système de production « binaire », consistant à vaporiser un fluide à bas point d’ébullition par l’eau géothermique, permet l’exploitation de sources géothermiques de basse température.
Un développement à plus grand échelle de la géothermie nécessite des aides publiques. Or, en Belgique, ce sont principalement l’éolien et le photovoltaïque qui bénéficient de subventions, d’ailleurs massives, même si, ces derniers temps, en raison de la crise économique et d’une croissance en berne, la politique d’incitations à l’égard de ces secteurs fait l’objet d’une remise en question.
Ainsi, par exemple, en Flandre, il a été décidé, il y a plusieurs mois déjà d’imposer aux propriétaires de panneaux photovoltaïques, de payer une taxe (tarif d’injection !) de 50 EUR par kW crête installé afin de rétablir l’équité à l’égard des consommateurs ne possédant pas de panneaux photovoltaïques, d’une part, et d’alléger la charge financière liée à cette forme d’énergie, d’autre part.
En Wallonie, de pareilles décisions devraient être prises bientôt. Ceci s’inscrit dans le contexte plus large des limites des énergies renouvelables intermittentes, de leur contribution importante à l’augmentation du coût de l’électricité, de leur impact négatif sur la croissance économique et de la faible création nette d’emplois qu’elles engendrent, sans compter les diverses nuisances qu’elles occasionnent.
Dès lors, ne serait-il pas temps de procéder à un réajustement de la politique à l’égard des énergies renouvelables ?
Ne serait-il pas indiqué de privilégier le renouvelable non-intermittent tel que la géothermie ou la biomasse (et d’assurer ainsi davantage la diversification des sources d’approvisionnement), par rapport au renouvelable intermittent, onéreux pour les consommateurs et peu efficace, et de prévoir les mesures qui conviennent à son développement ?