Formation professionnelle · 6 propositions pour aller plus loin

Michel Fourmy, spécialiste en management des ressources humaines, expert auprès de l’Institut Thomas More

Avril 2018 • Note d’actualité 50 •


Le projet de loi sur la formation professionnelle, dont Muriel Pénicaud, ministre du Travail, a détaillé les contours il y a quelques semaines, doit être présenté en Conseil des ministres le vendredi 27 avril. Le projet contient des avancées significatives (gouvernance, monétisation du CPF, TPE/PME, etc.) mais reste encore trop loin du « big bang » attendu et nécessaire. Pour l’accomplir, il convient de changer de paradigme et de donner les clés du système aux bon acteurs : régions, entreprises et salariés eux-mêmes. Telle est le sens de nos propositions.


Quatre chiffres résument à eux seuls le constat d’échec de la formation professionnelle : le système engloutit 34 milliards d’euros par an et fait vivre 55 000 organismes de formation ; pendant ce temps, notre pays compte 3,4 millions de demandeurs d’emplois et 600 000 emplois restent vacants faute de candidats présentant les compétences requises.

Poussons un peu plus loin le constat. Notre système de formation bénéficie beaucoup plus aux salariés qu’aux demandeurs d’emploi, et beaucoup plus aux cadres qu’aux ouvriers. Il ne permet pas aux jeunes (15-24 ans) d’accéder à l’emploi : 25% d’entre eux sont au chômage (contre 11% en Allemagne). Il alloue aux salariés, via le Compte personnel de formation (CPF), des millions d’heures de formation dont 80% ne sont jamais utilisées. Un maquis d’organismes paritaires, de comités, de branches professionnelles rend le système opaque, ingérable et coûteux. Sa seule gouvernance engloutit au moins 10% des 34 milliards d’euros dépensés chaque année. Les organisations syndicales et patronales qui s’alimentent à cette manne n’ont aucun intérêt à faire évoluer les choses aussi profondément qu’il serait nécessaire.

C’est dire l’ampleur du gâchis et de l’échec. La dernière réforme, en 2014, avait timidement tenté de déplacer les lignes mais elle n’était pas assez systémique et oubliait de mettre les enjeux d’employabilité au cœur du débat. Emmanuel Macron avait promis une nouvelle réforme pendant la campagne présidentielle. Muriel Pénicaud, ministre du Travail, en a présenté les contours le 5 mars dernier et le texte devrait être intégré à un projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », présenté en conseil des ministres dans la deuxième quinzaine d’avril. Le projet propose des avancées significatives mais reste encore trop loin du « big bang » annoncé.

Ce « big bang », seul susceptible de nous sortir du cercle vicieux de l’inefficacité, passe par des évolutions plus ambitieuses. La gouvernance de notre système de formation doit être confiée aux régions. Les entreprises doivent être libres de former leurs salariés comme elles l’entendent et astreintes à une obligation de résultat sur leur employabilité. Enfin, les individus doivent être incités à se prendre en charge ; en matière d’employabilité, ils ont des droits et aussi des devoirs. C’est le sens des six propositions que nous formulons ici.

Les avancées de la réforme 2018

Au vu des premières annonces du gouvernement, la réforme de 2018 s’annonce tout de même plus ambitieuse que celle de 2014 et va au-delà des timides propositions issues de la négociation préalable avec les partenaires sociaux. Six avancées méritent d’être notées.

Une gouvernance simplifiée et allégée

Le nombre des OPCA serait réduit à dix et abandonneraient aux URSSAF la collecte du prélèvement formation. En parallèle, l’Etat réorganiserait la gouvernance du système de formation professionnelle autour de France Compétences, un établissement public sous tutelle du ministère du Travail. Cette réduction du nombre d’intervenants laisse espérer une meilleure cohérence des politiques publiques et une baisse des dépenses de fonctionnement.

La monétisation du CPF, enfin

Le Compte personnel de formation (CPF) détenu par chaque actif serait désormais exprimé en euros, et plus seulement en heures, avec un taux de conversion heures/euros identique pour toutes les catégories de salariés. Un moyen efficace de réduire des écarts de tarifs parfois ahurissants (de 1 à 6 pour une même formation qualifiante !) et de signifier à chacun qu’il est acteur de son employabilité.

Les Conseils en évolution professionnelle montent en puissance

Pôle Emploi, l’APEC, les missions locales et les OPCA restants, voire les FONGECIF, devraient bénéficier de 200 à 300 millions d’euros supplémentaires par an pour conseiller les salariés sur leur employabilité et l’évolution de leurs compétences. Les actifs qui s’interrogent sur ces sujets disposeraient ainsi d’interlocuteurs qualifiés pour mûrir leur réflexion.

Simplification des versements formation

Les entreprises effectuaient des versements formation auprès d’une vingtaine d’organismes collecteurs, auxquels elles adressaient de multiples documents justificatifs. L’URSSAF deviendrait le seul organisme collecteur, avec un taux unique de 1,23% de la masse salariale pour les entreprises jusqu’à 10 salariés et de 1,68% au-delà. Un détail ? Non : tout ce qui simplifie la vie des entreprises est bon à prendre.

Des fonds mutualisés pour les TPE et les PME

Les salariés des TPE et PME se forment moins que les autres pour des raisons d’organisation du travail (toute absence perturbe l’activité) et de coût. Grâce à la mobilisation de fonds mutualisés, le coût salarial du collaborateur parti en formation serait désormais pris en charge dans tous les cas. De quoi réduire les disparités entre salariés des grandes et des petites entreprises.

Des mesures techniques favorables à l’alternance

Les taxes pour l’apprentissage et la professionnalisation seraient fusionnées dans un versement unique de 0,8% de la masse salariale. Les régions devraient pouvoir mettre en place une GPEC sectorielle de l’alternance à l’échelle de leur territoire. Enfin, les entreprises de moins de 250 salariés bénéficieraient d’aides renforcées et pourraient embaucher un apprenti à n’importe quel moment de l’année.

Six propositions pour aller plus loin

Nous l’avons dit, les principales annonces de la réforme 2018 vont dans le bon sens. Mais elles n’y vont pas assez fort ! Pour accomplir le « big bang » de la formation professionnelle, tant attendu et si nécessaire, il convient de changer de paradigme en donnant réellement et pleinement les clés du système aux bon acteurs : régions, entreprises et salariés. C’est pourquoi nos propositions s’organisent autour de deux objectifs : décentraliser la gouvernance de la formation pour qu’elle réponde mieux aux besoins des territoires et des entreprises ; faire de l’employabilité des actifs la priorité qui donne son sens à l’ensemble du dispositif.

Proposition 1. Confier la gouvernance du système de formation aux régions

En créant l’agence France Compétences, l’État vise à simplifier la gouvernance de la formation professionnelle. Mais, ce faisant, il a aussi déployé une vision technocratique et jacobine, en profond décalage avec les réalités du terrain. Nous croyons que l’échelon le plus pertinent pour gérer la formation professionnelle est aujourd’hui la région, et non l’État, et proposons deux évolutions allant dans ce sens.

S’appuyer sur l’expertise des régions. Parce que seulement 2% de la population salariée française (soit environ 400 000 personnes) est mobile sur le plan géographique : les 98% restants sont attachés à leur région, voire à leur département ou à leur ville. Parce que 80% des emplois privés sont fournis par des ETI, des PME et des TPE : autrement dit, par des entreprises qui travaillent sur un territoire local et proposent rarement une mobilité géographique à leurs collaborateurs. Mais aussi parce que les régions sont déjà en prise directe avec les questions d’emploi et de compétences de leurs bassins d’emploi. Elles financent des lycées professionnels, des formations en alternance, des contrats d’apprentissage. Elles subventionnent leurs entreprises quand celles-ci s’agrandissent ou déménagent. Elles se dotent d’agences économiques pour attirer de nouvelles implantations, venues d’autres régions de France ou de l’étranger. Enfin parce qu’il existe des exemples probants de politiques régionales réussies, comme celle menée par la région Centre-Val de Loire, qui affiche un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale, cible les besoins de son tissu de PME, organise des transferts provisoires de salariés d’une entreprise à l’autre selon leur niveau d’activité.

Mettre les branches professionnelles au service des régions, et non l’inverse. Le système dans lequel les régions sont au service des branches professionnelles doit être inversé. Ce n’est pas aux branches professionnelles de déterminer dans quels métiers les actifs doivent se former. En revanche, elles ont toute légitimité pour définir des parcours certifiants, dans des métiers identifiés comme porteurs par les régions.

Nous proposons donc de confier aux régions la gouvernance « formation » de leur territoire : coordination des structures publiques et des financements, Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) à l’échelle des bassins d’emplois, adaptation régionale des mesures nationales etc. Il suffira d’une instance paritaire par région pour gérer ce dispositif. Quant à la cohérence nationale, elle sera garantie par Régions de France, qui représentera les régions auprès des pouvoirs publics et en particulier, de la nouvelle instance quadripartite France Compétences.

Proposition 2. Laisser les entreprises financer librement la formation de leurs salariés

Le système de formation actuel complique inutilement la tâche des entreprises. Elles versent des prélèvements qui leur sont ensuite retournés sous forme de remboursement des formations suivies. Elles doivent retenir des prestataires agréés alors que l’agrément ne garantit en rien la qualité des enseignements. Elles doivent archiver et transmettre des programmes pédagogiques, des feuilles de présence, des décomptes de nombre d’heures suivies, etc.

Ces formalités sans valeur ajoutée consomment un temps et une énergie considérables. Elles ne laissent pas de place à une démarche d’anticipation aussi décisive que la GPEC ou à l’entretien professionnel créé par la réforme de 2014. Le travail administratif s’accumule, les enjeux d’employabilité passent à la trappe, etc. Il faut changer cela, et de manière audacieuse.

Donner carte blanche aux entreprises pour le budget, les contenus et les prestataires. Voilà pourquoi nous proposons de laisser les entreprises financer librement la formation de leurs salariés. Ainsi, elles pourront la considérer comme un investissement, et non plus comme un coût. Elles continueront à verser un prélèvement (1% de la masse salariale par exemple) pour les catégories d’actifs les plus éloignées du marché du travail : demandeurs d’emploi, apprentis, alternants, jeunes sans qualification. Mais dès qu’il s’agira de leurs collaborateurs, elles auront carte blanche pour fixer leur budget formation, définir les compétences prioritaires et choisir des prestataires. En contrepartie, elles auront une obligation de résultats sur l’employabilité de leurs collaborateurs (Proposition 3).

Supprimer l’agrément pour les formations aux entreprises. Cette simplification majeure doit s’accompagner de nouvelles modalités d’agrément des organismes de formation. Ceux de ces organismes qui travaillent sur des programmes financés par des fonds publics continueront à être agréés : l’État doit savoir comment ses deniers sont utilisés. En revanche, le contenu de l’agrément doit changer pour se focaliser sur la qualité des formations et des acquis des stagiaires. A l’inverse, les organismes de formation qui travaillent pour les entreprises doivent être dispensés de toute formalité d’agrément, puisqu’ils sont financés sur fonds privés. Leurs clients sont capables d’identifier par eux-mêmes des prestataires compétents, comme ils le font déjà pour leurs autres achats : faisons-leur confiance.

Proposition 3. Fixer aux entreprises une obligation de résultat sur l’employabilité de leurs salariés

Dégagées des obligations de moyens en matière de formation, les entreprises auront en contrepartie une obligation de résultats sur l’employabilité de leurs salariés. Un changement de paradigme qui résume à lui seul l’esprit du « big bang » que nous appelons de nos vœux.

Exploiter plusieurs leviers pour renforcer l’employabilité. En commençant par anticiper les évolutions de l’environnement économique et les adaptations de compétences qu’elles impliquent, au lieu de les subir. En faisant ensuite de l’entretien professionnel un moment-clé de dialogue avec les salariés. Cet entretien est aujourd’hui vécu comme une contrainte inutile, quand il n’est pas confondu avec l’entretien d’évaluation. Il peut servir à présenter les évolutions de l’activité de l’entreprise, à évoquer le parcours professionnel et les projets du salarié, à identifier avec lui des compétences à acquérir etc. Il conviendrait également de remplacer le plan annuel de formation, trop axé sur les moyens, par un Plan de développement de l’emploi et de l’employabilité (PDEE). Et en parallèle, de réactiver les démarches de Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). La GPEC est obligatoire depuis la loi Borloo de 2005. En pratique, beaucoup d’entreprises n’ont rien mis en place ou ont abandonné leur démarche. Celle-ci doit être réactivée partout, dans l’esprit proposé par la loi et avec une perspective minimale à trois ans.

Travailler en lien étroit avec les partenaires sociaux. Il serait en effet pertinent d’associer les partenaires sociaux au PDEE et à la GPEC à trois ans, dans un esprit de responsabilité partagée. Aujourd’hui, les organisations syndicales tirent une grande partie de leur financement de leur présence dans de multiples instances paritaires. Mais elles figent le système au lieu de le faire évoluer. Elles doivent contribuer aux politiques d’employabilité là où elles sont légitimes, dans les entreprises, sur le terrain qu’elles connaissent le mieux. Elles y apporteront une vision et une approche complémentaires de celles des dirigeants.

En pratique, l’obligation de résultat fixée à l’employeur interviendra en cas de licenciement individuel ou collectif. Si une entreprise veut se séparer de collaborateurs au motif que leurs compétences ne sont plus adaptées, elle devra démontrer qu’elle a tout mis en œuvre pour améliorer leur employabilité. En l’absence de preuves, le licenciement ou la procédure collective seront invalidés.

Proposition 4. Inciter les actifs à s’approprier leur employabilité

L’emploi à vie dans la même entreprise, les parcours professionnels rectilignes, l’exercice pendant 40 ans du même métier ne sont plus de saison. 80% des salariés d’aujourd’hui devront changer une ou deux fois d’entreprise ou de métier pendant leur carrière. Beaucoup passeront par une période de chômage. Certains devront entreprendre une reconversion. De plus, l’explosion des nouvelles technologies annonce une accélération de ces changements de trajectoire, tout en rendant les connaissances plus accessibles : e-learning, MOOC, entraînement sur tablette ou smartphone, etc. Il est donc temps de faire comprendre aux salariés que l’État et l’entreprise ne sont pas les seuls responsables de leur employabilité : cet enjeu leur appartient, et ils ont des droits et des devoirs dans ce domaine. Ils ont aussi à y gagner en termes d’autonomie.

Communiquer via des campagnes nationales et régionales. L’objectif ici n’est plus de déréglementer ou de changer les règles du jeu, mais de sensibiliser et d’informer les actifs sur un sujet qui les intéresse peu. L’État et les régions doivent ainsi communiquer à travers des campagnes de communication grand public, comme il en existe par exemple sur les sujets de santé publique. Il doit simplifier l’accès à la formation et aux conseils en évolution professionnelle. La monétisation du CPF et le renforcement des moyens alloués aux CEP (Pôle Emploi, APEC, missions locales, etc.), deux mesures de la réforme de 2018, vont dans ce sens.

Exploiter pleinement l’entretien professionnel. Les entreprises doivent proposer un nouveau regard sur la formation : on n’envoie pas un salarié en stage pour le « récompenser » d’un bon résultat mais pour renforcer ses compétences. On anticipe les problèmes d’organisation des équipes plutôt que d’interdire la participation à un stage au dernier moment. L’entretien professionnel doit servir à sensibiliser les collaborateurs, à se poser avec eux les bonnes questions, à rappeler que les compétences propres à leur poste évoluent au fil du temps. Il doit inviter chacun à se former de sa propre initiative, par exemple sur internet, en complément des stages proposés par l’employeur. Enfin, l’État et les acteurs politiques doivent renoncer au dogme de la « sécurisation du parcours professionnel ». Leur responsabilité est de dire que la sécurité de l’emploi appartient au passé. L’enjeu aujourd’hui est d’organiser la capacité des actifs à adapter leur potentiel aux besoins d’un marché du travail flexible, évolutif et incertain.

Proposition 5. Assouplir et valoriser les cursus en alternance

Sur l’alternance, il faut aller au-delà des mesures techniques proposées par Muriel Pénicaud pour assouplir et dynamiser enfin l’alternance dans notre pays.

Permettre à une région de créer des cursus sur mesure, répondant aux besoins de ses bassins d’emploi. Comme nous le rappelons plus haut (Proposition 1), la réforme de 2018 devrait inciter les régions à cibler leur politique d’alternance en fonction d’une Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) par secteurs d’activité. Cette avancée ne prendra toutefois son sens que si les règles d’organisation des cursus en alternance sont assouplies. Ces cursus ne doivent plus être cantonnés à la préparation de formations qualifiantes définies par les branches professionnelles. Une région doit pouvoir créer des cursus sur mesure, qui puisent à plusieurs sources pour répondre aux besoins de ses bassins d’emploi.

Aider les jeunes sans expérience à comprendre le monde du travail. La région doit aussi pouvoir intégrer à ces cursus des compétences qui relèvent du savoir-être et de l’acculturation au monde du travail : découverte du vocabulaire de base, sens des responsabilités, capacité à travailler en équipe, importance du respect des règles et des horaires, etc. Car pour les jeunes de 18 ans qui n’ont jamais travaillé, cet apprentissage est aussi décisif que l’obtention d’un diplôme pour réussir leur intégration dans l’entreprise.

Réévaluer la rémunération des alternants afin qu’un jeune de 18 ans touche au moins le SMIC. Il pourra ainsi associer accès à l’emploi et début d’accès à l’autonomie sociale. En contrepartie de ce coup de pouce salarial, la rupture du contrat d’alternance à la seule initiative du jeune deviendra moins avantageuse : l’alternant sera incité à aller au bout de son parcours ou à négocier une fin de contrat de type rupture conventionnelle.

Proposition 6. Créer un mécanisme d’abondement défiscalisé du salarié sur son CPF

La réforme de 2018, nous l’avons dit, met en place la monétisation du Compte personnel de formation (CPF). De plus, elle revoit à la hausse les plafonds d’heures : ils passent à 400 heures (au lieu de 150) pour les salariés qualifiés, et à 550 heures pour les salariés non-qualifiés – soit l’équivalent d’environ 6 000 à 8 000 euros.

Ajouter un mécanisme d’abondement défiscalisé à la monétisation du CPF. Cette proposition vise à signifier clairement aux actifs que leur employabilité leur appartient. Ainsi, ils seront incités à s’impliquer davantage dans leur avenir professionnel et dans l’évolution de leurs compétences. Les règles de défiscalisation devraient être attractives. On peut imaginer que les abondements soient déductibles du revenu imposable jusqu’à 10% du salaire annuel. Pourquoi 10% ? Parce que ce même taux s’applique aux versements sur un contrat de retraite de type Plan d’épargne retraite populaire (PERP). Autrement dit, il deviendra aussi « rentable » d’investir pour son employabilité que d’épargner pour ses vieux jours. Cette mesure peut sembler secondaire. Pourtant, elle a une forte portée symbolique, en associant dans un même mécanisme l’incitation de l’État et la volonté de l’individu d’agir pour son employabilité.

Conclusion

Imaginons que ces six propositions soient adoptées et viennent enrichir et renforcer la réforme en cours. Les régions deviendront les pilotes des politiques publiques de formation, en lien étroit avec les acteurs locaux et les bassins d’emploi. Elles auront un dialogue enrichi avec les entreprises, qui disposeront d’outils de GPEC conçus avec les partenaires sociaux.

Les demandeurs d’emploi et les primo-accédants à l’emploi bénéficieront de politiques publiques financées par la contribution de 1% des entreprises. Ils se formeront auprès d’organismes agréés dont les qualités pédagogiques auront été validées. Les jeunes bénéficieront de cursus en alternance parfaitement adaptés aux besoins de leur région. Les entreprises financeront librement leur politique de formation et la structureront avec les partenaires sociaux, dans le cadre d’une GPEC à trois ans. Cette liberté aura pour contrepartie une obligation de résultat sur l’employabilité de leurs collaborateurs. Les actifs, enfin, auront une conscience claire des enjeux de leur employabilité et seront incités à s’approprier leur parcours professionnel, avec l’appui de l’État et de leur entreprise.

On pourra alors parler cette fois d’un réel « big bang » de la formation professionnelle. On pourra penser que les 34 milliards d’euros annuels de la formation seront mieux dépensés, au profit de tous. On pourra enfin espérer qu’il n’y aura pas à attendre quatre ans de plus et une nouvelle législature pour que cela bouge. Car c’est tout de suite que nous avons besoin d’une réforme ambitieuse.