L’Europe, c’est aussi la justice · 4 pistes pour la réforme

Claude Girard, pseudonyme d’un jeune magistrat français

Avril 2006 • Note 8 •


L’Union européenne (UE) est devenu un canard sans tête… L’énorme machine à produire de la norme et du règlement continue de tourner comme si de rien n’était, ou presque, alors que la calamiteuse année 2005 (référendums français et néerlandais, débats sur la PAC, crise budgétaire, ouverture des négociations avec la Turquie) a clairement marqué une rupture dans le processus d’intégration. Qui sait aujourd’hui où va l’UE ? Qui veut encore se poser la question des finalités : pourquoi et pour quoi construit-on l’Europe ?

Ce sentiment de confusion et de brumes profondes est particulièrement sensible quand on se penche sur les questions de justice en Europe.  Un programme pluriannuel 2005-2010, dit programme de La Haye, fut adopté par le Conseil en novembre 2004 . En juin 2005, la Commission présentait au Conseil un plan d’action énumérant « le détail des mesures et le calendrier pour la mise en œuvre du programme de La Haye » . Et en décembre 2005, le gouvernement autrichien, qui s’apprêtait à prendre pour six mois la présidence de l’UE, proposait dans son programme opérationnel de faire de « l’application et de l’évaluation à mi-parcours » du Programme de La Haye le cœur de son action en matière de « liberté, sécurité, justice ».

S’était-on aperçu que, dans le courant de cette même année 2005, deux des pays fondateurs avaient prononcé un nom massif au Traité constitutionnel qui devait donner un cadre institutionnel, et peut-être avant tout politique, à tout cela ?… On dirait que non. Il y a, qu’on nous passe l’image, bien de l’aveuglement dans tant de surdité ! Car c’est de réponses politiques dont a enfin besoin l’Europe pour faire face à un vent de contestation confus et en cours de généralisation qui risque bien un jour, si l’on n’y prend garde, de déborder des limites politiques et civiles de la démocratie.

Ce complet déphasage, cette sensation d’une action européenne menée dans l’atmosphère artificielle et filtrée d’un laboratoire parfaitement confiné, est particulièrement dommageable sur les questions de justice en Europe. Car c’est, avec certains programmes universitaires, l’un des domaines où l’on pourrait le mieux montrer la cohérence et la nécessité d’une action européenne, au plus proche de l’individu et de sa vie quotidienne.

L’Institut Thomas More formule donc aujourd’hui quatre pistes de réformes qui permettraient de faire avancer l’Europe de la justice – et d’envoyer un signal politique fort . L’intérêt de ces pistes est d’ailleurs qu’elles sont applicables en l’état actuel des traités.

En matière de vie démocratique, d’application du précieux principe de subsidiarité, de vitalisation et de prise en compte de la société civile, de garantie des droits fondamentaux, mais aussi de coopération judiciaire à l’échelle de l’UE, de lutte contre la criminalité trans-étatique et contre le terrorisme, de véritables réformes sont possibles, comme le montre avec force la présente Note.