31 mai 2011 • Analyse •
La fiscalité française est devenue illisible et inefficace. Sans prétendre à une remise à plat complète, à moins d’un an de l’élection présidentielle, la réforme fiscale annoncée par le président de la République pour le mois de juin s’avère décevante. Pour tenter de répondre aux vrais besoins de réforme, aux attentes des contribuables et aux exigences de notre économie, l’Institut Thomas More et l’IREF ont décidé d’unir leurs voix pour formuler quatre propositions en contre point des projets formulés par Nicolas Sarkozy et son gouvernement.
Le 16 novembre 2010, expliquant à la télévision les raisons du nouveau remaniement du gouvernement Fillon, Nicolas Sarkozy annonçait aux Français une réforme fiscale avant la fin de son quinquennat. Cette annonce s’articulait autour de deux axes : « arriver d’ici au printemps 2011 à harmoniser la fiscalité française et la fiscalité allemande », créer ensuite un « nouvel impôt sur le patrimoine dont l’idée [serait] la suivante : l’erreur faite dans les années passées, c’était de taxer le patrimoine alors qu’il vaut mieux taxer les revenus du patrimoine et les plus-values du patrimoine » – laissant entendre qu’on allait vers une suppression du bouclier fiscal en même temps que de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune).
Ces annonces ont bien sûr fait débat et de nombreux commentateurs, de gauche comme de droite, ont publiquement soutenu ou critiqué les pistes de réflexion présidentielles. La création d’un nouvel impôt sur le patrimoine fut vertement discutée jusque dans les rangs de la majorité. Le président de la commission des Finances du Sénat Jean Arthuis déclara : « taxer des plus-values latentes, c’est une pure folie. Que se passera-t-il les années de crise ou le patrimoine des contribuables perdra de la valeur ? On se retrouvera avec un trou dans les caisses de l’État ». Le député Jérôme Chartier renchérit : « On voudrait faire en sorte que des contribuables quittent le pays on ne s’y prendrait pas autrement »…
Tant et si bien qu’en mars 2011, le ministre du Budget François Baroin profita d’un colloque organisé à Bercy sur la fiscalité du patrimoine pour corriger le tir et annoncer que le gouvernement travaillait sur un autre scénario, ne nécessitant plus la création de ce nouvel impôt, qui « consisterait à supprimer non seulement le bouclier fiscal mais aussi les causes du bouclier fiscal, c’est à dire à refondre profondément l’ISF ». Finalement, l’impôt demeure donc, mais son taux maximum est réduit de 1,8% à 0,5% et il ne serait dû que pour les patrimoines supérieurs à 1,3 millions d’euros. Il n’existerait plus que deux tranches : 0,25% en dessous de 3 millions d’euros et 0,5% au-delà. Après aménagement des effets de seuil, tous les patrimoines devraient y gagner, quand bien même le taux d’impôt s’appliquerait au premier euro.
Ainsi, à une annonce claire et ambitieuse succède une demi-réforme doublée d’une nouvelle usine à gaz imaginée en forme d’exit tax pour emprisonner sur leur territoire les riches français privés du bouclier fiscal désormais aboli plutôt que de les inciter à y rester. Et la réforme s’enferme elle-même dans une mathématique infantile et stérile tendant à remplacer à l’euro l’euro la part de taxe dégrevée par une autre taxe pesant exactement sur les mêmes redevable de telle façon que la mesure apparaît ainsi totalement inutile.
Pour tenter de répondre aux vrais besoins de réforme, aux attentes des contribuables et aux exigences de notre économie, , l’Institut Thomas More (ITM) et l’Institut de Recherches Économiques et Fiscales (IREF) ont décidé d’unir leurs voix pour formuler quatre propositions en contre point des projets fomulés par Nicolas Sarkozy et son gouvernement. D’aucun jugera peut-être les pistes avancées trop audacieuses et électoralement périlleuses à un an d’un scrutin présidentiel. Qu’importe… Le débat fiscal à double détente qui se prépare en France – avec un premier acte en ce printemps 2011 et le second acte en 2012 – est trop important pour qu’on se satisfasse d’une telle prudence. En matière fiscale comme de dépenses publiques, la France ne peut plus se permettre de réformes pusillanimes…