Le problème de l’Allemagne, c’est la France

Wolfgang Glomb, membre du conseil d’orientation de l’Institut Thomas More

19 février 2014 • Opinion •


L’Allemagne a un problème. Ce problème, c’est la France. Une France inapte aux réformes, malgré les annonces récentes du président de la République. Les données macro économiques de la France sont préoccupantes, en particulier en ce qui concerne la compétitivité. Selon le classement annuel du Forum économique mondial de Davos, la France a reculé de la 15e à la 23 e place en 2013, en trois ans, alors que l’Allemagne est au 4e rang. Ses plus mauvais résultats concernent son système d’imposition (127e) et la flexibilité de son marché du travail (116e). Le fossé se creuse de plus en plus entre les deux rives du Rhin. La contribution de l’industrie au PIB a reculé en France pour atteindre 12%, contre 25% pour l’Allemagne.

Le gouvernement allemand et les médias ont exulté à l’annonce du changement de cap du président français. Mais une baisse de cotisations sociales de 30 milliards d’euros, comme l’a annoncé François Hollande, ne réglera pas le problème du pays. Les coûts salariaux des entreprises françaises ne sont pas la cause centrale de la perte de compétitivité de l’industrie française, malgré le«moulin à prières », ou plutôt à reproches, adressé à une Allemagne soupçonnée de dumping salarial. En réalité, les salaires, avec charges sociales, sont à peu près aussi élevés en Allemagne qu’en France dans le secteur manufacturier, le seul exposé à la concurrence étrangère. La compétitivité est mesurée par les coûts salariaux unitaires, c’est-à-dire par l’évolution des coûts de travail corrigés de la productivité. Cette dernière joue un rôle décisif et explique les gains de compétitivité du secteur manufacturier en Allemagne. C’est elle qui a fait baisser des coûts salariaux unitaires qui ont augmenté en France.

La productivité requiert, entre autres, un marché du travail flexible et souple. Le marché du travail ne peut pas être productif si c’est l’État qui fixe la durée du travail, les salaires minimaux ainsi que le nombre des embauches qui figure maintenant comme contre partie pour la suppression des cotisations familiales dans le nouveau pacte. Ce pacte n’aborde d’ailleurs pas du tout le chantier fondamental de la productivité. Il est loin d’être le début d’une politique de l’offre, même loin d’une thérapie de choc. Il n’est qu’un petit pas symbolique dans la bonne direction.

La même logique s’applique au financement du pacte. Les nouvelles baisses des charges familiales seront financées par des économies sur les dépenses publiques. Même si la dépense publique baisse de 50 milliards d’euros, elle représentera encore 55 % du PIB, un chiffre nettement supérieur à celui de l’Allemagne, qui est de 45%(avec un budget équilibré en 2013). Sans aucune précision, le deuxième chantier du pacte de responsabilité reste également un emballage trompeur. La France doit pourtant assainir rapidement ses finances publiques.

Au-delà de ces propositions floues, il est indispensable que le président réussisse à convaincre la chancelière allemande que « monsieur Croissance » s’est converti en «monsieur Austérité » s’il désire qu’elle soutienne son idée d’avancer sur une vraie union monétaire et économique avec un gouvernement économique de la zone euro, doté d’une capacité financière propre et dont les politiques seraient orientées vers la croissance, l’emploi et le renforcement industriel.

Le célèbre Comité des sages allemand n’a pas laissé le moindre doute, dans son dernier rapport annuel: le bon fonctionnement d’une monnaie commune à l’échelle européenne requiert l’abandon de la souveraineté nationale dans des domaines centraux. Les États qui refuseront cet abandon devront quitter la monnaie unique. C’est avec un grand intérêt que l’on suit en Allemagne le débat en cours en France sur la sortie de l’euro. L’avenir montrera si cette démarche n’est pas la solution ultime pour rétablir la compétitivité de l’industrie française.