Dettes publiques européennes · La solution ?

Sébastien Laye, chercheur associé à l’Institut Thomas More

Juin 2016 • Note d’actualité 37 •


Alors que le FMI paraît incapable de proposer une solution réaliste au fardeau de la dette grecque (suggérant récemment d’étendre les maturités finales de cette dette de 2040 à… 2080) et que les Britanniques s’interrogent, avec le Brexit, sur l’échec économique de la zone euro, un groupe d’économistes a récemment formulé des idées originales et crédibles pour régler le problème des dettes publiques en Europe. Après cinq années de crise et de marasme, tiendrait-on enfin la solution ? Analyse et décryptage de propositions hélas largement passées inaperçues chez nous…


Cinq années après le déclenchement de la crise des dettes souveraines en Europe, notre continent semble toujours aux prises avec une situation insurmontable : une croissance anémique, une inflation inexistante malgré la politique d’assouplissement quantitatif, une demande atone, et une reprise qui parait entravée par un stock de dettes toujours colossale. C’est dans ce contexte troublé qu’un groupe d’économistes de Cambridge, de la London School of Economics et du Walter Eucken Institute vient de publier un document de travail relatif au renforcement de la zone euro intitulé Reinforcing the Eurozone and Protecting an Open Society. Monitoring the Eurozone 2.

Nous avons étudié leurs propositions avec un angle critique et sur la base de ce travail, nous passons en revue quelques solutions claires pour assainir les finances publiques de la zone Euro. Le stock important de dettes souveraines en Europe (plus de 12 700 milliards d’euros) représente un risque de long terme pour la croissance économique sur le continent et un fardeau trop lourd pour les générations futures. Il est de notre responsabilité d’Européens réalistes, de traiter ce problème maintenant et d’éviter toute répétition future du scenario des dernières années.

Les travaux de Reichlin et Rey s’inscrivent dans cette logique, en cherchant à résoudre maintenant le fardeau des dettes publiques. A cet égard, ce document, au-delà de certains aspects techniques très novateurs, n’évite pas le débat politique et les auteurs rappellent (presqu’à chaque paragraphe…) que la résolution des problèmes de la dette est la condition sine qua non de la future prospérité économique de l’Europe. Nous sommes en désaccord avec eux sur certaines propositions, comme leur idée (qui ne nous paraît pas réaliste sur le plan budgétaire) d’émettre des refugee bonds pour financer l’aide aux refugiés du Moyen Orient (leur approche, qui s’inspire des fameux social bonds, pourrait cependant être appliquée à d’autres domaines sociaux relevant moins directement des États que l’accueil des réfugiés).

Cette approche de la crise financière présente deux mérites fondamentaux : les mesures proposées lient la résolution de la crise (restructuration des dettes) à un mécanisme de stabilisation de long-terme afin d’éviter la répétition des erreurs du passé et notamment du laxisme budgétaire. Elles peuvent en outre être mises en œuvre sans grande réforme institutionnelle de la construction européenne. Comme les auteurs de l’étude, nous aurions préféré un aggiornamento institutionnel, avec plus de convergence fiscale et budgétaire, des politiques économiques coordonnées : mais, prenant acte de la panne européenne (dont ce n’est pas le lieu ici de discuter les causes), il nous paraît plus utile de proposer, en pragmatiques, un nouveau mécanisme de stabilisation automatique qui ne requiert ni une mutualisation des dettes, ni de nouvelles institutions.