L’OTAN et les solidarités occidentales · Enjeux du sommet de Madrid

Jean-Sylvestre Mongrenier, chercheur associé à l’Institut Thomas More

Juin 2022 • Note d’actualité 82 •


Le sommet atlantique de Madrid se tient les 28, 29 et 30 juin 2022 alors que l’armée russe bombarde l’Ukraine. Cette agression militaire rend évident le basculement dans une nouvelle guerre froide entre la Russie-Eurasie et l’Occident. Les périls sont immenses. Déjà, la pression de Moscou sur les frontières nord et est de l’OTAN s’accroît. Avec le soutien de Xi Jinping, l’alliance Pékin-Moscou vise à diviser et affaiblir l’« Occident collectif », selon la formule de Vladimir Poutine lui-même. L’OTAN et ses pays membres doivent renforcer leurs positions sur un vaste arc qui s’étire de la mer de Barents à la mer Noire et prendre en compte le théâtre méditerranéen. Enfin, il n’est pas possible de détourner le regard des ambitions et agissements de Pékin.

Voici une peu plus de trois ans, l’OTAN et ses États membres célébraient les soixante-dix ans du traité de Washington (le traité de l’Atlantique Nord). Signé le 4 avril 1949, ledit traité instituait l’Alliance atlantique, vite complétée par une structure de commandement et un système de forces mises à disposition (l’OTAN stricto sensu). A l’origine de cette alliance, la menace soviétique sur l’Europe occidentale et l’Orient méditerranéen. Face à l’URSS, Harry Truman, président des États-Unis, avait énoncé une doctrine de containment (12 mars 1947). L’endiguement fut d’abord financier (le plan Marshall), la signature du traité de Washington lui donnant ensuite un prolongement militaire. Une clause d’assistance mutuelle (l’article 5) liait désormais les destinées de l’Amérique du Nord et de l’Europe occidentale.

En vérité, il s’agit là d’un pacte politico-militaire hors norme, la plupart des alliances contractées dans l’histoire n’ayant guère dépassé les dix ou quinze ans d’existence. Le caractère exceptionnel de cette alliance toujours en vie ne saurait pourtant occulter l’ampleur des menaces qui pèsent à nouveau sur l’Europe. Aujourd’hui, l’Ukraine subit les bombardements de l’armée russe et la pression militaire de Moscou sur les frontières nord et est de l’OTAN s’accroît. Avec le soutien explicite de XI Jinping à Vladimir Poutine, l’alliance de fait qui regroupe la Chine populaire et la « Russie-Eurasie » vise à détruire ce qui reste dans le monde d’hégémonie occidentale. Aussi importe-t-il de prendre en compte le contexte global et de saisir les exigences de l’heure.

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L’auteur

Jean-Sylvestre Mongrenier est chercheur associé à l’Institut Thomas More. Titulaire d’une licence d’histoire-géographie, d’une maîtrise de sciences politiques, d’un Master en géographie-géopolitique et docteur en géopolitique, il est professeur agrégé d’Histoire-Géographie et chercheur à l’Institut Français de Géopolitique (Université Paris VIII Vincennes-Saint-Denis). Il est conférencier à l’IHEDN (Institut des Hautes Études de la Défense Nationale, Paris), dont il est ancien auditeur et où il a reçu le Prix Scientifique 2007 pour sa thèse. Officier de réserve de la Marine nationale, il est rattaché au Centre d’Enseignement Supérieur de la Marine (CESM), à l’École Militaire. Il est notamment l’auteur de Géopolitique de l’Europe (PUF, « Que sais-je ? », 2020) et de Le Monde vu de Moscou. Géopolitique de la Russie et de l’Eurasie postsoviétique (PUF, 2020)